
Jeudi 28 Mars, dès 8h30, trois volontaires A., J., H. pour aller témoigner auprès des 4èmes du collège Saint Joseph ont retrouvé Patrick et Geneviève les bénévoles qui les accompagnaient et pris la route, direction Langeac. Dans le bus, derniers échanges afin de peaufiner le contenu de l’intervention: savoir se présenter, évoquer les raisons de son exil, de sa migration… en français, en anglais.
A notre arrivée, nous avons été accueillis très chaleureusement par Carine Batisse, directrice, Geneviève Rocher, professeure d’Histoire-Géographie à l’initiative de cette démarche pédagogique. Nous avons rejoint les élèves dans la salle prévue à cet effet. Geneviève, bénévole, a présenté le déroulé puis a proposé que chacun se présente: Patrick, A., J., H. et, enfin, le délégué de classe qui prit la parole au nom de tous les élèves. Dans un premier temps, Patrick a donné quelques précisions: qu’appelle-t-on demandeur d’asile? migrant? réfugié?... Il a expliqué ce qu’était un CADA, présenté celui de Saint Beauzire, son implantation sur le territoire, son rôle, le rôle des travailleurs sociaux, l’encadrement et le suivi qu’ils apportent à chaque résident. Puis, ce fut au tour de Geneviève d’évoquer l’association La Loco qui fédère les bénévoles souhaitant agir auprès des demandeurs d’asile, porter des projets, s’y associer dans le but de faciliter l’intégration, les échanges, le vivre-ensemble au sein de la structure, sur le territoire, au-delà…. Toutes ces actions se voulant complémentaires de celles menées par le CADA.
Ensuite, prise de parole des collégiens afin qu’ils expriment leurs attentes, leurs interrogations, leur ressenti, leur connaissance du sujet…Les réponses resteront en suspens car, au travers des récits, certains points seront éclairés. Vint alors le temps fort de cette rencontre: les témoignages. A. a ainsi pu raconter, dans un français bien correct, son « histoire ». Il a quitté son pays, l’Afghanistan, afin de fuir le régime des talibans tout en expliquant les conditions de vie imposées par ceux-ci: « Dans mon pays, maintenant, les talibans ne nous donnent pas le choix: où on les suit où l’on est tué, égorgé. Pour éviter cela, une seule solution, se cacher et fuir car, en plus, ils s’en prennent à nos familles. Les filles n’ont plus le droit d’aller à l’école, doivent rester à la maison, ne plus sortir seules, porter la burqa qui couvre entièrement le visage à l’exception des yeux, ne peuvent pas choisir un mari par amour, ne peuvent plus exercer un métier… Je ne suis pratiquement jamais à l’école. Je travaillais dans une imprimerie. Si vous volez, on vous coupe la main… Alors, je me suis caché, puis je suis parti à pied en traversant des forêts, plusieurs pays, une dizaine dont, l’Italie, la Suisse… Enfin la France, Strasbourg, Paris où j’ai pu déposer une demande d’asile. A ce moment-là, on m’a envoyé au CADA de Saint Beauzire. J’ai eu mon entretien à l’OFPRA; j’attends la réponse. C’est dur. Ma famille est restée là-bas. Régulièrement, les talibans viennent vérifier si je suis revenu pour m’arrêter… »
Quelques questions surgissent:
Vous avez mis combien de temps en tout? Un an.
Vous avez été maltraité? Oui, dans certains pays; quelques « migrants » comme moi ont même été tués…
Vous avez des nouvelles de votre famille? Pas souvent, c’est difficile. J’ai peur pour mes frères et sœurs, mes parents.
Pourquoi avoir choisi la France? Parce que l’on est mieux accueilli, mieux aidé que dans d’autres pays. Je voudrais faire ma vie ici et travailler dans l’informatique.
Ensuite c’est au tour de J. lui aussi afghan; il a fait la route avec A. son histoire est similaire: mêmes raisons de fuir, même parcours, mêmes attentes et espoirs que son ami. Il est allé à l’OFPRA, attend la réponse. Longue et dure attente. Il suit les cours de français, participe aux activités proposées, essaie d’oublier et, garde son sourire. Les mêmes questions lui sont posées par les élèves; il y apporte des réponses quand cela est possible.
Moments intenses que ces témoignages… alors, il est temps de marquer une pause. Foot, babyfoot, ping-pong avec les jeunes, le professeur d’anglais. Détente bien venue, conviviale…

Retour en salle où Geneviève, évoque le devenir d’un demandeur d’asile dont la demande a été rejetée. Dans ce cas, deux solutions soit, accepter ce que prévoit la loi française à savoir, le retour dans son pays soit, rester et rentrer dans la clandestinité. Ce qui est souvent le cas car le retour au pays est impensable, question de vie ou de mort. Geneviève prendra un exemple concret afin d’illustrer au mieux ce nouveau parcours à l’avenir plus que précaire, incertain… Nouvelles questions des collégiens, échanges à partir de celles-ci. Après ces échanges, évocation de l’engagement, des actions portées par les bénévoles de la Loco, le ressenti des bénéficiaires et, par Patrick, de la nouvelle loi sur l’immigration, de ses incidences. Ainsi se terminait notre intervention auprès des élèves de 4èmes qui applaudirent longuement les personnes ayant témoigné. Un grand merci aux jeunes, à leurs professeurs pour leur écoute, leur participation, leur délicatesse… C’est le moment du départ mais, surprise !... Des élèves de 3ème nous interpellent et nous demandent des nouvelles des demandeurs d’asile qui avaient témoigné l’an dernier dans leur classe notamment, de la jeune femme qui y participait. Leur souci était de savoir si leur demande avait abouti favorablement, ce qu’ils étaient devenus. Quelle joie d’apprendre que K … était maman désormais d’un petit garçon !
Durant le trajet de retour le plaisir procuré par cette rencontre sera exprimé ainsi que le désir de renouveler cette expérience.