La Loco à "Acteurs de fraternité", l'émission de RCF Radio

Acteurs de fraternité

Anne-Lena a été contactée il y une dizaine de jours par une journaliste de RCF-Radio qui voulait l'interviewer sur les missions et les actions de "la Loco" dans le cadre de l'émission "Acteurs de fraternité".
Ayant un emploi du temps plus que rempli, elle a préféré renvoyer la journaliste vers Didier, notre trésorier, qui s'est très bien acquitté de la tâche, comme vous pourrez le constater en écoutant le podcast ci dessous

Fichier audio

 

Vous pouvez aussi écouter directement sur le site de RCF-Radio l'émission "Acteurs de fraternité", dans laquelle s'intègre l'interview de Didier.

"Acteurs de fraternité" se définit comme "une émission pour montrer qu'il n'est pas si difficile que ça de s'engager et d'aller à la rencontre des autres. Mise en lumière des structures (associations, entreprises) qui travaillent sur le lien à l’autre dans sa grande diversité. Éclairage sur des initiatives locales et des structures en mouvement."

Retranscription de l'interview

la Journaliste :
Octroyer le droit d'asile à des personnes qui fuient des conflits ou des dictatures. C'est déjà un premier pas pour leur permettre de se construire une nouvelle vie. Mais comment prendre pied dans un pays dont on ne connaît ni la langue, ni la culture, ni la cuisine, ni bon nombre de codes dans différents domaines ? Alors l'association La Loco s'est fixé pour objectif d'accompagner les migrants demandeurs d'asile afin de faciliter leur accueil au sein de notre pays.

Didier Luce est le trésorier de l'association et surtout l'un des membres fondateurs. Il est notre invité aujourd'hui et avec lui, nous allons découvrir la diversité des actions mises en œuvre par l'association. Didier, bonjour.

Didier :
Bonjour.

la Journaliste :
Les centres d'accueil et d'orientation ont été les premières structures, enfin une des premières structures en charge de l'accueil des migrants demandeurs d'asile. Ils sont supprimés aujourd'hui et les personnes accueillies sont redirigées vers les Cada, Centre d'Accueil des Demandeurs d'Asile. Les personnes migrantes restent dans les Cada jusqu'à l'obtention du droit d'asile et ensuite, vers quoi peuvent elles être dirigées ?

Didier :
Une fois qu'ils ont obtenu le droit d'asile, les Cada, en lien avec l'OFII, dirigent les nouveaux — comment dire ? — statutaires qui s'appellent, qu'on appelle nous après des réfugiés. Il les oriente soit sur des lieux de formation que sont les CPH, les Centres Provisoires  d'Hébergementou au cours duquel ils vont pouvoir continuer l'apprentissage du français. Ou alors ils peuvent être dirigés sur des lieux de formation, par exemple en lien avec l'Afpa, des HOPE, les HOPE c'est les métiers en tension.
L'État et l'OFII ont mis en place avec l'Afpa des temps de formation sur les métiers en tension, auxquels participent certains réfugiés. Et puis autrement, ils sortent sur un appartement ou tout simplement dans le travail. Et donc il leur faut aussi un appartement sur les villes de notre région.

la Journaliste :
Un CADA n'a pas pour mission d'organiser des actions d'accompagnement des personnes accueillies. Et c'est là que votre association prend toute sa valeur parce que vous, à La Loco, vous proposez un panel d'activités pour favoriser la rencontre avec la population locale. C'est bien cela ?

Didier :
Oui, c'est cela dans le sens où dans les Cada, il y a certaines actions qui sont menées par les équipes sociales, autre que l'administratif. Mais c'est vrai que nous, l'association, c'est tous les jours qu'on nous proposons aux demandeurs d'asile des actions et la possibilité de rejoindre la population locale.

la Journaliste :
Alors justement, vous vous appuyez sur ce que vous appelez une commission des habitants dans laquelle on retrouve les habitants du territoire et les personnes migrantes. C'est bien cela ? Et ce sont eux, ensemble qui décident, propose des activités qui pourraient être mises en œuvre.

Didier :
Alors c'est le but en tous les cas de cette commission des habitants puisque ceux qui habitent le Cada habitent le territoire, puisque le candidat est sur le territoire sur lequel nous sommes. Et puis, il y a d'autres personnes qui participent. Donc l'idée, c'est de les rencontrer de façon sympathique, dans le sens ou on organise un repas fait souvent par les demandeurs d'asile du Cada.
Et au cours de ce repas, on discute sur les diverses actions qui se mènent ou qui sont à mettre en place dans le futur.

la Journaliste :
Donc, les activités que vous proposez, elles répondent aux besoins de tous les habitants et c'est ça qui est important. Aussi bien les personnes du territoire qui peuvent avoir envie de certaines activités. Et rappelons que nous sommes dans un territoire rural, que des besoins exprimés par les personnes accueillies dans le Cada, c'est bien cela ?

Didier :
C'est cela, oui. En fait, le but, c'est de soutenir la rencontre des demandeurs d'asile avec tous les autres habitants du territoire par le biais des diverses actions que nous mettons en place. Par exemple, — quelque chose qui a du mal à démarrer — j'ai insisté pendant des années en lançant des appels, mais par exemple, on donne des cours de code de la route aux personnes qui résident au Cada.
Et on aimerait l'ouvrir plus largement à d'autres personnes. Alors j'ai eu pendant quelque temps des jeunes de la Mission locale qui sont venus. Il y a eu d'autres habitants du territoire qui étaient intéressés, mais ça reste quand même des exceptions. Alors ce qu'on souhaiterait, par exemple dans toutes nos actions, c'est faire en sorte que ce soit vraiment un lieu de rencontre entre habitants et résidents du Cada.
On a eu aussi une tentative autour de ce qu'on a appelé, nous, en lien avec la fédération Léo-Lagrange Léo-sport-job. La Loco a initié sur le territoire, un temps, un lieu, des rencontres entre des jeunes de la Mission locale et les jeunes résidents du Cada qui avaient obtenu le droit d'asile. Et le but, c'était de les remotiver, ou de les motiver sur le travail à partir du sport, mais aussi à partir de la rencontre de la vie associative et citoyenne du territoire.
Et du coup, ça, on l'a tenté deux fois. Pour l'instant, on met une pause parce que on se rend compte que c'est difficile, parce que les jeunes qui sont au Cada sont orientés par l'OFII assez rapidement et du coup, ils n'ont pas le temps de rester sur ce temps de mobilisation. Mais du coup, ça avait marché pendant un temps, on a eu des jeunes de la Mission locale et des jeunes résidents du Cada pour participer.

la Journaliste :
J'ai vu votre site internet. C'est impressionnant la diversité des activités que vous proposez. Alors il y a autre chose que vous aimez promouvoir aussi, ce sont les contacts intergénérationnels ?

Didier :
Oui, alors de plusieurs manières. Déjà, comment dire. La plupart des bénévoles qui participent à La Loco, dans leur grande majorité mais pas tous, mais dans leur grande majorité la plupart des bénévoles qui sont habitants sur le territoire sont des personnes comme moi en retraite et donc déjà de l'intergénérationnel se fait à travers les cours de français qu'on donne, à travers les cours de code de la route, à travers les diverses actions, les bénévoles on est des gens d'un âge mûr et en retraite et ceux que nous accueillons sont en majorité des jeunes de 18 à 30 ans.
Donc l'intergénérationnel se joue déjà par cette manière là. On a mis en place aussi ce qu'on appelle des tandems. Les tandems, c'est c'est une famille ou un couple, ou une personne isolée qui reçoit un des résidents du Cada ou plusieurs pendant un week-end ou le temps d'aller faire des courses. Et tout ça pour soutenir justement la rencontre.
Et ça aussi, c'est de l'intergénérationnel. Mais autrement, on met en place sur le territoire aussi ce qu'on appelle les Thé-Cafés. Les Thé-Cafés, c'est le troisième dimanche de chaque mois et là on provoque vraiment les gens, les habitants à participer et ou c'est vraiment un temps de rencontre. Et du coup, il y a des familles qui viennent et du Cada et du territoire.
Mais il y a aussi des personnes en retraite ou isolées, et puis d'autres, et puis les gens du Cada. Donc c'est vraiment des temps vraiment conviviaux et au cours duquel il y a des choses qui se passent autour de la rencontre.

la Journaliste :
Nous avons employé plusieurs fois le mot territoire. Il est peut-être intéressant de rappeler de quel territoire nous parlons. En fait, votre association ainsi que le CADA sont situés à Saint-Beausire, à côté de Brioude. C'est bien ça ?

Didier :
Oui, celui de Brioude. Non, je rappelle qu'il y a aussi un Saint-Beausire à Clermont et souvent les cars arrivaient à Saint-Beausire de Clermont. Ils disaient on est bien devant la gare mais ce n'est pas la même structure.

la Journaliste :
Les activités que vous proposez ? Cette grande diversité d'activités. Est-ce que vous avez le sentiment aujourd'hui que ça facilite l'intégration des personnes migrantes ?

Didier :
Alors ça facilite l'intégration des personnes migrantes et nous espérons aussi que ça transforme les mentalités.

la Journaliste :
Des gens du territoire. Oui, c'est bien l'objectif. Vous insistez dessus et c'est important.

Didier :
Oui, c'est un double objectif parce que je pense que souvent j'essaye de raisonner et de dire "mais qu'est-ce qui fait que les gens ont peur des résidents du Cada ?" alors que ce sont des êtres humains qui sont en attente de rencontres, en attente de relations ? Et du coup, je me dis est-ce que les gens ont réfléchi de temps en temps à se dire "Tiens, ça pourrait être mon enfant, est-ce que j'aimerais que mon enfant soit accueilli s'il a à fuir un jour ou quoi que ce soit ?" Et donc c'est dans cet esprit-là, qu'on met en place toutes ces rencontres pour que les uns et les autres apprennent à se connaître et qu'il y ait la possibilité de vivre — c'est le thème de votre émission — la Fraternité.
La République française, c'est liberté, égalité et fraternité. Et ça il ne faut pas qu'on l'oublie.

la Journaliste :
J'allais le rappeler, le mot fraternité est inscrit sur le fronton de toutes nos mairies, mais à Saint-Beausire il a un contenu très concret.

Didier :
Oui mais il y a d'autres lieux. Je veux dire ce qu'on souhaitent, les associations qui oeuvrent dans ce sens, c'est que partout en France qu'il y ait des gens qui se rappellent qu'effectivement la rencontre et la fraternité, c'est quelque chose qui va soutenir l'insertion et l'intégration de ces personnes-là.

la Journaliste :
Par rapport à ce que vous êtes en train de nous dire là. Est-ce que vous vous voyez tomber des préjugés ? Est-ce que vous avez vu des gens arriver un peu réticents au départ dans certaines activités ? Ces préjugés, cette ouverture d'esprit que vous espérez, vous la voyez arriver ?

Didier :
Alors oui, quand même. Dans nos actions, on a des bénévoles et des résidents du Cada qui acceptent d'aller dans les écoles pour faire des témoignages. Donc actuellement, c'est beaucoup dans des lycées ou des collèges et souvent les bénévoles et les résidents reviennent avec un baume au cœur, c'est-à-dire... Par exemple, une jeune fille dans un des collèges, a dit "Mais moi je ne regarderai plus la télé de la même manière ou j'écouterai plus ce qui se dit autour des migrants parce qu'on découvre que c'est des personnes.
En fait, c'est vraiment la chose la plus importante, c'est qu'il faut arrêter de parler des gens. Il faut les rencontrer physiquement pour qu'il y ait quelque chose qui tombe. Quoi ? La peur, la peur de l'autre, on l'a tous. Enfin, je veux dire, c'est quelque chose, mais ça se soigne. Et les rencontres et la fraternité, la convivialité sont des éléments pour aller plus loin ensemble.

la Journaliste :
Alors on parle de peur, mais a contrario, quand il s'est établi de très bonnes relations entre les gens du territoire et les personnes qui sont accueillies au CADA, après ils peuvent partir ailleurs, à Clermont ou ailleurs. Peut être qu'il y a de la tristesse, du coup quand ils s'en vont?

Didier :
C'est une des choses qu'a réussi à nous démobiliser quelques bénévoles. 
Mais oui, parce qu'ils ont construit quelque chose avec et que du coup, ils s'en vont. Et c'est un deuil. Ce n'est pas la perte physique de quelqu'un. Enfin si, ils partent ailleurs...

la Journaliste :
Il y a la séparation de liens?

Didier :
Il y a la séparation qui est parfois difficile. Quand je dis ça, c'est arrivé à un ou deux...

la Journaliste :
mais c'est bon signe.

Didier :
Lourd. C'est trop lourd pour moi de continuer, voilà. Oui, ça veut dire qu'il y a quelque chose d'autre qui se joue et qui est de l'ordre de l'humain. Et par contre, après, on est très nombreux à avoir des liens avec tous ceux qu'on a accompagnés et qui continuent. Des fois on reçoit des coups de fil. "Tiens Didier, tu te rappelles de moi ?"
"Oui, on se rappelle de toi et qu'est-ce que tu deviens et tout ça". Et on est heureux de de savoir qui, qu'il continue. Des petites choses, par exemple, nous essayons d'agir aussi en lien avec d'autres associations, par exemple la Loco sur Clermont, on a quelques bénévoles de La Loco qui habitent Clermont par le biais de relations des uns ou des autres.
Et on a essayé de faire en sorte que ceux qui atterrissent sur Clermont, qui vont sur la ville, ne se sentent...

la Journaliste :
Pas tout seuls.

Didier :
Voilà, puissent rencontrer aussi des habitants. Et ça, pourquoi je vous dis ça ? Parce que avec mon épouse, on avait accompagné quelqu'un qui est resté, qui venait souvent à la maison et qui parlait vraiment très bien le français. Et quand il est arrivé à Clermont, on est allé le voir au bout de six mois et il nous a dit "Vous vous rendez compte que je n'ai pas parlé un seul Français depuis que je suis ici ?"
Et ça nous a fait de la peine parce que ils arrivent sur des appartements dans des lieux où il n'y a pas forcément énormément de relations entre les gens. Et puis, après ils trouvent un boulot, là c'était par rapport à je peux pas trop dire quoi, mais bon, ils se retrouvent entre eux aussi. Et du coup, lui, il était étonné de ne pas avoir pu dans une ville comme Clermont et du coup, on a essayé de réfléchir à la Loco, de se dire avec les bénévoles qu'on a sur Clermont et d'autres associations avec qui ils sont en lien, comment on peut favoriser et soutenir cette rencontre.
Et bien, il y a eu des choses qui ont eu lieu.

la Journaliste :
Didier j'espère que ce que vous êtes en train de dire, ça a bien été entendu par nos auditeurs et que ceux qui peuvent se sentir concernés par votre appel n'hésitent pas à prendre contact avec vous. 
Merci beaucoup en tout cas pour votre témoignage et nous avoir expliqué tout ce que fait cette association sur Saint-Beausire. Merci beaucoup et puis bon courage pour la suite.

Mardi 3 décembre 2024

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